Dernier jour au Met
May 27, 2017
Cela fait 9 mois que je suis Andrew W. Mellon fellow au Met.
Je rêvais d’avoir une expérience dans un musée américain et secrètement de travailler un jour auprès de Perrin Stein, conservateur des dessins français au Met. Voilà mon rêve d’historienne de l’art réalisé…
Ce sont d’abord mes recherches sur Hubert Robert qui ont bien évidemment bénéficié de cette expérience. Les nombreuses expositions vues, les conversations avec des chercheurs américains, les lectures de publications sur les enjeux économiques au XVIIIe siècle, puis progressivement le besoin de me détacher de la matérialité des oeuvres de Robert pour comprendre sa vision de l’art et du commerce tout cela a nourri l’écriture de ma thèse (et je n’en suis qu’au début).
Mes séances de travail avec Perrin, face aux dessins de Robert, ont été mes moments favoris. Je vous souhaite de trouver aussi bon challenger qu’elle dans votre domaine. Sa manière de concevoir le dialogue est simple : regarder ensemble et discuter de tout, échanger les idées, relire et vérifier la documentation, répondre aux questions qui n’ont pas été posées jusqu’à lors. Laisser reposer et y revenir quelques jours après. Perrin se pose TOUTES les questions sur un dessin et propose TOUS les scénarios possibles pour y répondre. C’était aussi stimulant qu’enrichissant !

Séance de travail avec Perrin Stein, décembre 2016 - Photo : Sarah Catala
Grâce à la bourse du Met, j’ai pu voyager (en fonction des collections riches en Hubert Robert) : Los Angeles, San Francisco, Sacramento, Washington, Philadelphie, Boston, Hartford, Williamstown, Cleveland, Detroit et Chicago. Les parcours des musées me stupéfient toujours tant ils sont différents de la France. Dans la plupart des musées américains, il s’agit moins d’éduquer que de séduire. Ou plutôt de faire la démonstration du pragmatisme à l'américaine : séduire pour éduquer… Par exemple, une oeuvre parfaitement valorisée (qualité de l’objet, situation, éclairage…) servira à attirer le visiteur dans un espace où il découvrira des oeuvres et pourra en apprendre plus grâce aux cartels. À ce sujet, la lecture des conférences de James Cuno résumées ici, m’a beaucoup aidée. Peut-être que la présentation des collections permanentes du Petit Palais s’approche des choix américains, mais en les battant à plat de couture sur les expositions :-p

Le cabinet des dessins des musées d'Harvard, Cambridge - Photo : Sarah Catala
La qualité remarquable - et qui me laisse vraiment admirative - des américains me semble être leur capacité à collaborer, échanger et progresser avec rapidité, en acceptant les contradictions sans entrer dans des conflits. Ils sont les rois de l’organisation de workshops, de séances de travail, de discussions passionnantes. Seul bémol : en arrivant trop rapidement à un consensus, ils oublient parfois de débattre.
À tous les étudiants impatients, parfois découragés comme je l’ai été, j’aimerais vous dire de ne pas abandonner. Poursuivez vos recherches, développez vos qualités et acceptez vos défauts. Un jour, ça se décantera et peut-être encore mieux, votre chemin ne prendra pas du tout la forme que vous imaginez. Je vous souhaite plein de surprises et candidatez au Met : c’est possible !
